# Autour du jeu d’échecs
<p style="text-align: right;font-style:oblique">! <a data-href="Food for thought" href="https://legerement-serieux.ch/Fiches/PsychoPhilo/Food+for+thought" class="internal-link" target="_blank" rel="noopener">Food for thought</a> !</p>
J’ai appris à jouer aux échecs vers l’âge de 6 ans et, adolescent, je me suis un temps passionné pour ce jeu. À cette époque, il n’y avait pas de machines contre lesquelles jouer ni d’internet pour faire des parties en ligne. J’ai laissé le jeu d’échecs de côté quand je suis arrivé à un niveau où, pour progresser, il eût fallu que j’apprenne de la théorie — les ouvertures, les fins de partie — et que je joue régulièrement contre des gens très forts, ce qui impliquait de passer du temps dans des locaux terriblement enfumés^[C’était un quart de siècle avant l’interdiction de fumer dans les locaux publics.]. Hors de question pour moi !
Passent une trentaine d’années ; je suis psychiatre-psychothérapeute et, au fil des entretiens avec mes patients, je réalise que c’est peut-être bien à travers le jeu d’échecs que j’ai appris un certain nombre de « principes » qui m’ont été fort utiles dans la vie. Ce sont des principes et des positions philosophiques qui peuvent être fructueuses pour tout un chacun et qui n’ont rien à voir avec des croyances ou des dogmes que l’on inculque à l’école où au catéchisme. À toutes fins utiles, je vous en livre un florilège. Si vous avez d’autres idées, elles sont les bienvenues !
### Ce que le jeu d’échecs nous enseigne
* Chacun joue à son tour.
* On ne peut jouer qu’un coup à la fois.
* On ne peut pas « reprendre » un coup. Quand c’est joué, c’est joué.
* Il s’agit d’imaginer des scénarios. Toujours avoir un « plan B », voire un « plan C ».
* On peut préparer la réponse et c’est même une bonne idée de le faire.
* Encore mieux : on peut préparer une variété de réponses possibles et sensées.
* On peut avoir un ou plusieurs coups d'avance. C’est généralement une bonne chose.
* On apprend à *planifier*.
* Il faut attendre la réponse de l’autre.
* Quand ce n’est pas à vous de jouer, vous avez loisir de vous occuper à autre chose, de penser à autre chose. Surtout si vos réponses sont déjà prêtes !
* On est toujours plus intelligent après!
* Même le joueur le plus fort du monde peut toujours repenser à une partie d’hier soir, d’il y a une semaine ou d’il y a dix ans et se dire « Ah, si, au 27e coup, j’avais poussé mon pion en E6, j’aurais pu gagner… »
* Les donneurs de leçon n’ont rien à dire !
* On peut parfois jouer un coup d’attente…
* ou même un coup de diversion.
* Même si on a joué un mauvais coup, il n’est pas pour autant certain qu’on va perdre la partie.
* Gagner la partie n’est pas le seul but, ni forcément le but ultime.
* Même si on perd la partie, on peut avoir du plaisir à jouer.
* On peut avoir du plaisir à jouer même si on ne joue pas « idéalement bien », même si l’on n’est pas un « champion ».
* Il est extrêmement difficile d’évaluer la valeur d’un coup.
* On peut même dire qu’il est *impossible*, la plupart du temps, d’évaluer *dans l’absolu* la valeur d’un coup. Par conséquent…
* Il n’y a pas forcément à chaque tour un « meilleur coup ». Il y a des coups à ne surtout pas jouer, mais il y a aussi tout un éventail de coups possibles dont on ne peut absolument pas dire *a priori* s’ils sont mauvais, moyens, bons ou très bons.
* Corollaire : la question « quelle est le meilleur coup à jouer ? » n’est pas une bonne question. Il est inutile de perdre du temps à chercher à y répondre.
* Je ne détermine pas à moi tout seul la configuration du jeu.
* On peut compliquer ou simplifier la situation.
* Il y a des règles à respecter.
* Les règles ne sont pas des entraves. Au contraire, elles permettent le jeu !
* La confrontation peut être pacifique, non violente.
* C’est *moi* qui joue ! C’est *moi* qui décide du coup à jouer.
* Même si, à l’occasion^[En fait, c’est très rare. Dans les parties en face à face, on joue seul du début à la fin. Mais, dans de grands championnats, une partie est parfois ajournée — c’est-à-dire qu’on l’interrompt et qu’on la reprend le lendemain — et, dans l’intervalle, chacun des joueurs peut consulter son équipe ou son ordinateur. Quant aux parties en lignes, c’est une autre histoire…], je peux demander une idée ou un conseil à quelqu’un.
* La *focalisation de l’attention*, la *concentration*.
* La différence entre *[[réfléchir]]* – c’est-à-dire chercher des solutions, des réponses – et *ruminer* – c’est-à-dire contempler le jeu sans faire avancer son plan.
* Au fur et à mesure des parties, on s’améliore, on apprend — y compris de ses erreurs.
* Ça ne sert à rien de s’énerver !
 
<p style="text-align: center;"><a href="https://dr-spinnler.ch"><img src="https://dr-spinnler.ch/myfiles/logos/Olivier-Spinnler.png" class= "signature"/></a></p>
<p style="text-align: center; font-style: italic;">le 30 mars 2023
</p>
 
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[[réflexions psychophilosophiques]]
#psychoPhilo #pensées