# « Je suis nul en maths ! »
<p style="text-align: right;font-style:oblique">! <a data-href="Food for thought" href="https://legerement-serieux.ch/Fiches/PsychoPhilo/food+for+thought" class="internal-link" target="_blank" rel="noopener">Food for thought</a> !</p>
Je connais beaucoup de personnes qui se disent « nulles en maths », alors qu’elles ne le sont pas forcément. Explications.
Tout d’abord, est-ce que ça existe d’être « nul » dans un tel domaine ? D’accord, il y a des gens qui sont plus doués que d’autres, certains qui sont plus avancés que d’autres. Mais « nul », est-ce que ça veut vraiment dire quelque chose ?
Et puis, quand elles disent cela — *Je suis nul en maths !* —, les personnes ne parlent pas de mathématiques de haut niveau, elles parlent des maths « scolaires », celles de l’école obligatoire. Parce qu’il est bien clair que tout le monde n’est pas censé « être bon en maths supérieures », n’est-ce pas ?
Alors, les mathématiques scolaires, c’est quoi ? C’est savoir faire des additions, des soustractions et des multiplications. Je ne parle pas des divisions, car c’est sûr que la plupart des gens qui ont terminé l’école obligatoire depuis plus de dix ans ne savent plus les faire avec un crayon. Les maths scolaires, c’est connaître un peu de livret — 6 × 8, 4 × 9 —, savoir multiplier ou diviser par 10 ou par 100, savoir ce qu’est un nombre pair, une fraction, un numérateur, un dénominateur. C’est l’arithmétique, en somme. Peut-être un peu d’algèbre ? Mais pas tellement plus que si a = 27 et b = 3, combien font a × b ?
Vous trouvez que c’est possible, pour quelqu’un de normalement intelligent de ne comprendre ou de ne pas savoir faire ces quelques opérations ? Quand c’est le cas, on dit que la personne souffre de *dyscalculie*, ce qui est un vrai *trouble de l’apprentissage*.
Personne ne dit « je suis nul pour faire des alexandrins ! » Pourquoi ? Parce qu’on est bien d’accord que tout le monde n’est pas censé savoir faire des alexandrins, en tout cas pas *facilement*.
Mais les maths scolaires, ce n’est pas l’équivalent des alexandrins, c’est l’équivalent de *savoir écrire*. Alors comment se fait-il que des personnes *normalement intelligentes* — c’est-à-dire pas *oligophrènes* — et qui ne souffrent pas de *dyscalculie* puissent proclamer « je suis nul en maths ! », ce qui est l’équivalent de « je suis nul en écriture » ?
J’ai vu plusieurs cas de figure :
* Par coquetterie — la coquetterie de se ranger dans une certaine catégorie de personnes. Ce « je suis nul en maths » sous-entendant, par exemple : « je suis un littéraire, pas un matheux ! ».
* Pour afficher un mépris de tout ce qui est « scientifique ». Ce qui est une autre forme de coquetterie, mais moins sympathique, celle-ci.
* Quand c’est une femme qui dit « je suis nulle en maths », il se peut qu’elle soit tombée dans le cliché « les maths, c’est pour les garçons, les filles sont plus littéraires ». Et si elle est dans ce cliché, c’est qu’on a dû le lui mettre dans la tête, à un moment ou à un autre.
* Pour la plupart des gens qui disent « je suis nul en maths », la vérité est simplement qu’ils n’aiment pas les maths, et c’est alors une façon de ne pas assumer ce désamour ou de se le cacher à eux-mêmes.
* Et s’ils n’aiment pas les maths, c’est soit qu’on les en a dégoûtés, soit qu’ils n’ont jamais eu de professeur de maths talentueux. Car un bon professeur devrait permettre aux élèves d’au moins apprécier sa branche et il ne devrait en tout cas pas les en dégoûter.
* Dernière possibilité : la personne ne s’est tout simplement jamais intéressée à cette branche, possiblement pour l’une des raisons citées plus haut ou pour une combinaison de ces raisons.
Je souligne encore une fois ce que j’ai dit plus haut : les maths scolaires sont à la portée de n’importe qui. Par conséquent, quand quelqu’un dit « je suis nul en maths », les explications psychologiques sont à chercher parmi les possibilités suivantes :
* L’autosabotage — « Je m’interdis de maîtriser les mathématiques scolaires. »
* Le manque d’estime de soi — « Je ne me crois pas capable de maîtriser les mathématiques scolaires. »
* La fausse identité *ou* l’identité construite faussement — « Ça fait partie de mon identité, je suis quelqu’un qui ne maîtrise pas les mathématiques scolaires. »
* La paresse intellectuelle — « Je ne fais même pas l’effort de maîtriser les mathématiques scolaires. »
Vous constatez que ce sont toutes des problématiques qui peuvent être dépassées, qui sont accessibles à un minimum de travail sur soi. Par conséquent, au bout du compte, **personne** ne devrait tomber dans cette coquetterie ou cette autocomplaisance de clamer « je suis nul en maths ! » Il y a juste un ou deux petits efforts à faire.
Je pourrais aussi dire qu’aucun enfant convenablement entouré par ses parents et par ses enseignants ne devrait devenir quelqu’un qui dit de lui qu’il est « nul en maths ».
 
<p style="text-align: center;"><a href="https://dr-spinnler.ch"><img src="https://dr-spinnler.ch/myfiles/logos/Logo-Dr.png" class= "signature"/></a></p>
<p style="text-align: center; font-style: italic;">le 21 octobre 2023
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